L’esthétique du Summer of love
Le Summer of love est souvent présenté comme l’évènement ayant plébiscité la contre-culture hippie à l’international. Cette appellation fait référence à un regroupement de milliers de personnes venues du monde entier à San Francisco qui s’étendra sur plusieurs mois en 1967, l’apogée du mouvement prendra place en été ou plus de 200 000 personnes seront réunies.
La contre-culture hippie
Le mouvement hippie est souvent décrit comme inscrit dans la contre-culture. Né dans les années 60 aux Etats-Unis, il se caractérise par une rupture avec les normes sociétales. Le mouvement est particulièrement opposé à la guerre du Vietnam1 dont la présence américaine s’intensifie à partir de 1965. Profondément pacifistes, les membres du mouvement prônent une rupture avec l’American way of life. Le mouvement est anticonsumériste et met en avant des principes de fraternité et de liberté sous toutes ses formes s’inspirant de philosophies orientales et d’idées défendues par les auteurs de la Beat generation2 (les membres du mouvement hippies sont aussi appelés les Beatniks).
Parmi les éléments iconographiques hérités du mouvement, l’un des plus célèbre est probablement celui aujourd’hui connu comme le symbole de la paix, souvent perçu comme l’allégorie de l’expression Peace and love. Créé par le graphiste Gerald Holtom à l’occasion de la campagne pour le désarmement nucléaire, le signe est la combinaison des lettres “N” et “D” dans l’alphabet sémaphore3 pour Nuclear Disarmament.
Summer of love
L’année 1967 marque l’arrivée du Summer of love, dès janvier de grands évènements sont organisés au Golden Gate Park de San Francisco près du quartier de Haight-Ashbury où s’organise la communauté hippie. On y trouve gratuitement de la nourriture, des drogues comme le LSD (encore légal aux Etats-Unis) ou le cannabis et même un centre hospitalier. Parmi ces réunions, de nombreux concerts, pièces de théâtre et lectures sont organisés.
Le festival international de la musique pop de Monterey qui se tient du 16 au 18 juin 1967, est probablement l’un des événements les plus marquants du Summer of love. Il est notamment connu pour être la première représentation de grande envergure de Jimi Hendrix, de Janis Joplin, d’Otis Redding et du groupe The Who.
La musique tient une grande place dans le mouvement et sa diffusion. Pour plébisciter le festival, l’un des membres du groupe The Mamas & The Papas, John Phillips composera la chanson San Francisco (Be sure to wear Flower in your hair) qui devient rapidement un tube.
Les Beatles participeront aussi à la diffusion de l’esprit du Summer of love avec l’album Sgt. Pepper’s Lonely Hearts Club Band de juin 1967, en particulier leur chanson toujours très connue, All you need is love.
Flower Power
L’expression Flower Power apparaît pendant le Summer of love, pendant lequel les participants sont encouragés à porter des fleurs dans leur cheveux et à en distribuer. La fleur devient le symbole de l’idéologie pacifiste du mouvement, des fleurs sont offertes aux agents de police ou glisser dans le canon d’arme lors de manifestation. Une photo devenue célèbre capture un de ces moments lors d’une marche vers le Pentagone contre la guerre du Vietnam en octobre 1967.
Psychédélisme
Quand l’on parle du mouvement hippie, les premières images convoquées sont souvent liées à la mode vestimentaire. Fleurs et motifs fleuris, cheveux longs, couleurs vives, Tie and dye, et jean patte d’éléphant sont autant d’incontournables de cette période. Mais l’apogée esthétique du mouvement est portée par le psychédélisme.
L’esthétique psychédélique est liée à l’usage de drogue psychotrope comme le LSD. L’usage de ces substances est vu comme un moyen d’abolir ses frontières mentales, d’ouvrir son esprit. Cette esthétique se retrouve chez certains groupes dont les Grateful Dead, Pink Floyd et The Doors sont des exemples.
Dans le domaine de l’image c’est à travers les affiches de festivals, de concerts et les pochettes d’albums que l’esthétique psychédélique se développe. Le quartier de Haight-Ashbury où se tient le Summer of love, est souvent vu comme le berceau du rock psychédélique.
On y voit fleurir un grand nombre d’affiches plébiscitant festivals et concerts. A cette époque, il n’existe pas de presse ou de médias spécialisés dans la musique underground, ainsi les annonces et réclames autour de ces événements passent surtout par l’affiche. La lisibilité fait place à l’esthétique et les passants doivent déchiffrer ces représentations aux couleurs saturées et contrastées, dans lesquels s’enchevêtrent des courbes et où jusqu’à la typographie est déformée.
Parmi les graphistes ayant rendu le psychédélisme populaire, on trouve certains géants comme Martin Sharp, Bill Graham et les créateurs du Mouse Studio (Alton Kelley, Wes Wilson, Victor Moscoso, Rick Griffin et Stanley “Mouse” Miller). A travers leurs réalisations où l’on identifie des influences d’Art Nouveau, d’Op Art et d’art indien, le but de ces artistes est de représenter la musicalité des groupes qu’ils illustrent à travers des productions percutantes.
Si le psychédélisme connait un véritable essor via la scène musicale, on retrouve l’esthétique dans d’autres domaines.
Dans l’image on le retrouve au cinéma, notamment dans les films et les films d’animations. Cette influence se retrouve aussi dans la Bande Dessinée, tant dans l’esthétique que la construction du scénario.
Outre le psychédélisme, le mouvement hippie va influencer d’autres productions. Si la contre-culture rejette la société de consommation, le mouvement fascine et est exploité comme une mode. La comédie musicale Hair ou le film Easy Rider font le récit du mode de vie des membres du mouvement et deviennent très vite des succès commerciaux.
Fin du mouvement
Le mouvement perd peu à peu en influence autour des années 1970. Le décès de plusieurs artistes emblématiques du mouvement (Jimi Hendrix, et Janis Joplin par exemple) à la suite de consommation de drogue dure. L’échec d’événement pensé pour s’inscrire dans la lignée du Summer of love et du festival de Woodstock, comme le concert gratuit des Rolling Stones en 1969 qui sera marqué par des violences et la mort d’un membre du public. Et la médiatisation des affaires Charles Manson qui avait adopté dans sa communauté une philosophie hippie affichée sont autant d’éléments qui entachent le mouvement et lui font perdre en influence.
Héritage de l’esthétique du mouvement
Cependant plus de 50 ans après la fin du mouvement hippie, ce dernier n’a pas totalement disparu. Beaucoup de causes sociales encore cruciales aujourd’hui peuvent y être directement lié, l’écologie, les luttes pour l’égalité, que ce soit pour s’ériger contre le racisme ou le féminisme. Le mouvement est régulièrement convoqué dans le cadre d’événement festif et chaque année de grandes fêtes sont organisés sur ce thème.
L’esthétique héritée du mouvement hippie a fait son entrée dans le bagage culturel occidental et réapparait régulièrement. Que ce soit dans la mode ou le design d’intérieur ou encore dans le graphisme. De nombreux artistes revisitent régulièrement le psychédélisme et les sites d’images stocks regorgent de proposition autour du Flower Power, en particulier en cette saison.
Enfin l’esthétique du mouvement est régulièrement mise en avant par les institutions artistiques, notamment via des expositions et des rétrospectives. On pense notamment aux expositions lumineuses organisées à l’occasion du 50ème anniversaire du Summer of love. Le psychédélisme est particulièrement mis en avant et est très régulièrement revisité, l’exposition la plus récente s’achevait à Paris en janvier 2024 à l’Atelier Basfroi.
On espère que cet article vous aura plu et vous apportera de l’inspiration pour le reste de l’été ! N’hésitez pas à poster vos créations sur les réseaux sociaux avec le #OKPROD ou sur notre discord on a hâte de les voir !
Et si vous avez besoin d’un petit coup de pouce on vous conseille ces tutos pour la réalisation de fleurs surréalistes ou de fond psychédéliques.
Profitez bien de l’été et à très vite sur Okprod !
Illustration de couverture, Jimi Hendrix par Martin Sharp 1971
- La date du début de conflit de la guerre du Vietnam est souvent située en 1955, le conflit s’achève en 1975. ↩︎
- La Beat generation fait référence à un mouvement culturel et littéraire américain des années 50-60 formé par de jeunes artistes dont Jack Kerouac, Allen Ginsberg, et William Burroughs. ↩︎
- L’alphabet sémaphore est un moyen de communication visuel utilisé par la marine militaire. Ce dernier était surtout utilisé au début du XIXe siècle avant l’invention de technologie de communication comme la radiotélégraphie. ↩︎